Depuis près de quarante ans, les travaux de recherche sur le plurilinguisme se multiplient, remettant en cause l'idéologie monolingue-mononormative des apprentissages langagiers (Auger, 2021), au nom notamment du principe socio-constructiviste de prise en compte du déjà-là langagier des apprenants (Coste, Moore, Zarate, 1997 ; Castellotti, 2001 ; Troncy, 2014 ; Candelier, Manno 2023...).

Les assises désormais solides dont bénéficient ces travaux semblent pourtant, comme dans d'autres contextes (Causa, Stratilaki, 2019) implicitement ou explicitement contestées par les centres de langues universitaires de français langue étrangère en France, que ce soit au niveau institutionnel, par le recours préférentiel à des « natifs français » de la langue française, ou au niveau des pratiques ou des discours enseignants au nom du nécessaire « bain linguistique » de la classe de langue.

La communication se propose d'explorer comment et pourquoi deux centres de langues universitaires normands sortent ou ne sortent pas de ce cadre idéologique monolingue, fruit d'une longue tradition depuis la méthode « maternelle » ou directe, jusqu'aux approches communicatives ou actionnelles, qui ne l'ont jamais vraiment remis en cause (Suzo López, Valdés Melguizo, 2020).

Comment les travaux de recherche sur le plurilinguisme sont-ils reçus aujourd'hui, alors qu'ils sont nécessairement connus, par les acteurs des centres, de quelle manière le CECR (Conseil de l'Europe, 2001, 2018) est-il mobilisé, au-delà des niveaux de références, et les répertoires langagiers sont-ils convoqués, notamment dans les niveaux débutants A1 et A2 ? Quelle place en particulier est réservé à l'anglais, langue dans l'écrasante majorité des cas déjà connue du public étudiant qui fréquente les centres de FLE universitaires (Forlot, 2009).

Pour ce faire, nous avons remis un questionnaire aux enseignants intervenants dans ces centres et nous sommes entretenue avec certains d'eux, ainsi qu'avec les responsables pédagogiques.

Nous présenterons les résultats de ces enquêtes, en nous demandant comment les étudiants en didactique du FLE reçoivent des discours parfois contradictoires entre la formation universitaire qu'ils ont reçue et les milieux professionnels qui les accueillent.

Mots-clefs : idéologie monolingue ; centres de langues universitaires ; français langue étrangère

Références bibliographiques :

Auger, N. (2021). « La présence de la langue française dans le monde : enjeux des représentations », in Chiss J.-L. (dir.), Le FLE et la francophonie dans le monde, Paris : Armand Colin : 81-112.

Candelier, M. & Manno, G. (dir.) (2023). La didactique intégrée des langues – Apprendre une langue avec d'autres langues ? ADEB.

Castellotti, V. (2001). La langue maternelle en classe de langue étrangère. Paris : CLE International.

Causa, M. & Stratilaki-Klein, S. (dir.) (2019). Distance(s) et didactique des langues. L'exemple de l'enseignement bilingue. Paris : ADEB, EME.

Conseil de L'Europe (2001, 2018). Un cadre européen commun de référence pour les langues : Apprendre, enseigner, évaluer. Strasbourg : Conseil de l'Europe.

Consultable à https://www.coe.int/fr/web/commoneuropean-frameworkreference-languages/home

Coste, D., Moore, D. & Zarate, G. (1997). Compétence plurilingue et pluriculturelle. Strasbourg : Conseil de l'Europe.

Forlot G. (2009). L'anglais et le plurilinguisme. Pour une didactique des contacts et des passerelles linguistiques. Paris : L'Harmattan.

Suzo López J. & Valdés Melguizo I. (dir) (2020). La Méthode directe d'enseignement des langues, Documents pour l'histoire du français langue étrangère et seconde, n° 64-65.

Troncy, C. (dir.), de Pietro, J.-F., Goletto, L., Kervran, M. (coll.) (2014). Didactique du plurilinguisme. Approches plurielles des langues et des cultures. Autour de Michel Candelier. Rennes : Presses universitaires de Rennes.